LAURA BAUDOUX
Comment retrouver le chemin de l’amour par-delà la guerre, par-delà la guerre civile, par-delà la cruauté d’une dictature violente qui aura fait, en un seul pays, plusieurs centaines de milliers de morts – et peut-être plus d’un million et demi ?... S’ils n’ont, à proprement parler, dirigé le Cambodge que durant la seconde moitié des années 70, on ignore souvent que le mouvement des Khmers rouges n’aura, pour de bon, cessé d’exister qu’au seuil de l’an 2000. Une période suffisamment proche pour que même les ados s’en souviennent – mais le pays ne compte heureusement pas que cela. Son passé est riche, son patrimoine fabuleux, son paysage divers, sa jeunesse nombreuse et énergique.
La photographe, elle, ne fait que passer, parcourir, survoler… Et pourtant.
Le cran et l’aplomb de Laura Baudoux – qui, perdue au Cambodge, ne parle même pas la langue – ont quelque chose de saisissant. Elle arrête les gens (ne pas croire que ce soit plus facile avec les enfants qu’avec les grands !), s’approche d’eux ou s’accroupit à leur hauteur, les cadre de face, cherche et soutient leur regard rieur ou inquiet, candide ou intense, mais qui toujours semble dévoiler l’être avec franchise, plutôt que de composer une image ou de se réfugier dans un rôle. Laura a un sens – certes classique, mais tellement classieux – du cadre et du détail, un sens du dénuement, un sens surtout du sujet, qu’elle traite dans un même élan de générosité, d’attention, de confiance. Elle sait capter la lumière comme on cicatriserait une blessure, trouver la beauté… tout en ne faisant que passer. Les rues savent lui ouvrir leurs veines, les familles leur porte, les enfants leur cœur. C’est déjà beaucoup.
eda, déc. 2012
