© Forensic Architecture - Sea Watch

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Forensic Architecture & Forensic Oceanography

Mare Clausum - Le cas Sea Watch contre les garde-côtes libyens

Video, 28’55’’, 2018

En 2017, la collaboration entre l’Italie, l’Union Européenne et la Libye a eu pour effet une augmentation des interceptions en mer par les garde-côtes libyens. Mieux équipés et prêts à faire usage d’une force disproportionnée, ils se sont mis à patrouiller de plus en plus loin des côtes libyennes et se sont dès lors trouvés confrontés aux ONG qui menaient déjà des opérations de sauvetage de migrants en Méditerranée. Le 6 novembre 2017, l’ONG Sea Watch et les garde-côtes libyens se sont retrouvés engagés dans une opération de recherche et de sauvetage sous haute tension impliquant un bateau qui transportait 140 migrants. Malgré l’attitude extrêmement dangereuse du navire des garde-côtes libyens, Sea Watch a malgré tout réussi à récupérer et amener en Italie 59 personnes dont un enfant mort, alors que 47 personnes ont été reconduites en Libye. Le reste des passagers du bateau sont morts avant et pendant l’opération. Lors de ce drame, alors que les navires de Sea Watch et des garde-côtes libyens opéraient presque coque contre coque et que les logiques humanitaires et sécuritaires s’affrontaient, l’Europe et la Libye n’ont jamais été aussi proches, à juste quelques mètres de distance.

Forensic Architecture & Forensic Oceanography

Forensic Architecture, littéralement « architecture judiciaire ou légale », est une agence de recherche basée au Goldsmiths College de l’Université de Londres (UK), constituée d’architectes, d’artistes, de cinéastes, de journalistes, de programmeurs, de scientifiques, d’avocats et d’un large réseau de collaborateurs issus d’une grande variété de domaines et de disciplines. Elle mène des enquêtes approfondies basées sur des reconstructions spatiales et l’analyse de différents médias dans des cas de violations des droits humains. Elle le fait avec et au nom d’organisations humanitaires, de tribunaux internationaux, de groupes de défense de l’environnement, de médias ou encore de communautés victimes de violence politique. Ils enquêtent sur les crimes d’état ou d’entreprise, les violations des droits humains et les dommages environnementaux dans le monde entier.

Forensic Oceanography est un projet initié au sein de Forensic Architecture par Charles Heller et Lorenzo Pezzani à la suite des « Printemps arabes » de 2011. Son but est d’étudier de manière critique l’établissement par les états européens de frontières maritimes militarisées en analysant les conditions politiques, spatiales et esthétiques qui ont transformé les eaux de la Méditerranée en un liquide mortel pour les migrants qui cherchent à la traverser clandestinement. Les plus de 30.000 migrants morts en mer au cours des 30 dernières années sont les victimes de ce que Forensic Oceanography appelle la « violence liquide ».

En combinant des témoignages avec les traces laissées à travers le « flux numérique » de la mer, c’est-à-dire des données radar, des images satellites et des systèmes de suivi des navires, Forensic Oceanography détourne les moyens de surveillance existants pour dénoncer la violence des frontières et l’état d’(in)visibilité sur lequel elle repose.

Alors que les mers ont été découpées en un espace légal complexe qui permet aux états d’étendre leur emprise par des opérations policières au-delà des limites de leur territoire, mais aussi de se soustraire à certaines obligations comme secourir les navires en détresse, Forensic Oceanography cherche à localiser des incidents particuliers à l’intérieur des frontières maritimes légales de l’Union Européenne afin d’en déterminer les responsabilités. Les rapports de Forensic Oceanography ont ainsi servi de base dans plusieurs actions judiciaires contre des états européens.

 

forensic-architecture.org